MAX MARCHAND, DE MOULOUD FERAOUN
ET DE LEURS COMPAGNONS
CSE Bulletin de liaison N°17
Bulletin de liaison, d'information et de documentation N°17
diffusé par le Service des Centres Sociaux Éducatifs
Château Royal, El-Biar, Alger
1er Trimestre 1961 (imprimé en juin 1961)
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Sommaire
- Éditorial (par Marcel LESNE)
- Pédagogie
— Les auxiliaires audio-visuels
— Possibilités et limites d'enseignement à distance
— Education de Base, et Télévision en Algérie
— Les Emissions Radiophoniques des CSE
— Fondements psychologiques des Campagnes
— Utilisation d'un ensemble complet de moyens audio-visuels
— Utilisation d'un ensemble incomplet de moyens audio-visuels - Information
— Vie des Centres
— La Campagne « Femêtres » au CSE d'Er-Rahel
— Coopération
— Aspects juridiques des Coopératives d'Education de Base
— Les Premières Coopératives d'Education Base - Documentation :
— Au C.F.E.B.
— Films - fixes
— Documents nouveaux
— Brochures
EDITORIAL
Ce bulletin n" 17 n'a pas l'ambition de traiter les problèmes de l'utilisation des moyens audio-visuels dans l'Education de Base ; l'essentiel a déjà été dit à ce sujet et aussi bien les publications de l'UNESCO ou du Centre audio-visuel de St-Cloud peuvent-elles apporter aux esprits les plus curieux toutes les précisions nécessaires. Il se propose plus modestement d'attirer l'attention des chefs de Centre sur certaines modalités d'action, appelées « campagnes », qui permettent de déborder du cadre des activités à public fixe et d'atteindre les collectivités elles-mêmes, dans leur en semble.
Un Centre Social Educatif assume normalement deux genres d'activités.
— D'une part, certains groupes d'auditeurs, réunis certains jours, à certaines heures, selon un emploi du temps adapté et établi à l'avance, reçoivent une formation systématique : alphabétisation, préformation professionnelle, éducation familiale et ménagère, préscolarisation, éducation rurale, etc...
Cet enseignement très utilitaire et étroitement adapté aux besoins locaux constitue l'essentiel du travail du personnel et figure en bonne place dans le tableau de service de chacun des éducateurs. La régularité et l'efficacité de cet enseignement, le sentiment qu'éprouvent les auditeurs d'en tirer un profit immédiat ou de se préparer effectivement à des tâches futures, en relation directe avec l'amélioration de leur niveau de vie (salaire, apprentissage de techniques simples, alphabétisation...) sont les garanties d'une fréquentation régulière et nombreuse. Bien entendu, les moyens audio-visuels, films fixes notamment, figurent en bonne place parmi ceux mis en œuvre pour assurer cet enseignement concret et pratique.
— D'autre part, à côté de ces tâches pour lesquelles le Centre Social Educatif joue, par rapport aux institutions existantes, le rôle de précurseur ou de complément, et qui réclame une organisation souvent remaniée certes, mais minutieuse et stricte, d'autres tâches aussi importantes, si non primordiales, requièrent l'activité du personnel. Il s'agit ici de viser la collectivité toute entière, d'essayer d'atteindre le plus grand nombre possible d'individus, particulièrement les adultes des deux sexes. Cette action a pour premier effet d'assurer l'importance et le renouvellement des effectifs des groupes à public fixe mentionnés plus haut ; mais elle a pour but principal d'assurer une éducation de masse en fonction d'objectifs simples en rapport avec les préoccupations de la collectivité : dans telle région où la flore mellifère est abondante le Centre Social Educatif peut inciter les fellahs à installer de nouvelles ruches ou à améliorer les ruches de fabrication locale — lorsque les chaleurs arrivent, une éducation des mères de famille permet de diminuer les risques de gastro-entérite — en accord avec les services de l'agriculture (S.A.P. ou S.A.R.) une préparation des esprits et une sensibilisation à certains problèmes assurent une plus grande pénétration de l'action officielle en faveur de l'amélioration rurale — partout, si modestes que soient les revenus, l'alimentation et l'habillement peuvent être améliorés par une meilleure utilisation des matières premières ou un meilleur entretien...
Ces méthodes d'action rapides et frappantes, utilisant un ensemble varié de moyens audio-visuels, se révélent absolument indispensaoles si le Centre Social Educatif veut aller au devant des popuiarions pour les amener à lui ou les conduire vers l'institution spécialisée trop souvent ignorée.
L'équipe de recherches pédagogiques du Service, après des années de recherches et d'essais, a mis au point, outre les documents educatifs bien connus du personnel, quelques campagnes-types : gastro-enterite, trachome, ruche, etc... mettant en œuvre une série complète de moyens audio-visuels. Certains chefs de Centre sont quelque peu ettrayés par les termes de « campagnes » ou « d'education de masse », et croient en entreprenant une action de ce genre, devoir se placer dans l'obligation de réunir tout un village devant un écran. D'autres trouvent aussi, d'ailleurs à juste titre, que les campagnes-types ne correspondent pas exactement à la réalité de leur centre et hésitent, par conformisme, à entreprendre des moditications ou des compléments.
La réalité est beaucoup plus simple, et beaucoup de chefs de Centre, ainsi qu'il a été permis de le constater au cours des journées pédagogiques, réalisent des campagnes sans le savoir. A partir d'une brochure, d'un film-fixe, d'une affiche, de simples photos, une action concrète et systématique peut être conduite pourvu qu'elle réponde à un besoin conscient ou inconscient de la population, qu'elle débouche obligatoirement vers un objectif concret réalisable et soigneusement étudié, qu'elle imprègne, selon un plan établi en réunion d'équipe, l'activité de tous les éducateurs, en fonction du but poursuivi.
On trouvera dans les pages qui suivent des exemples théoriques et pratiques de véritables campagnes menées avec un ensemble complet de moyens audio-visuels. On ne saurait trop insister sur la valeur et la nécessité de telles actions concertées. Ce sont elles qui confèrent son véritable aspect à l'action des Centres Sociaux Educatifs auprès des masses d'adolescents ou d'adultes. La précaution essentielle, au départ, est de déterminer nettement l'objectif que l'on se propose d'atteindre (fabrication de ruches ou de garde-manger, amélioration de l'habitat, etc...) et de s'assurer que les moyens concrets de réalisation existent réellement ou sont à la portée des auditeurs.
Contrairement aux apparences, les « campagnes » échouent rarement. Les échecs sont souvent moins graves qu'on pourrait le croire. Dégager d'une collectivité une poignée d'hommes ou de femmes résolus à passer à l'action, constitue un succès très net car c'est à partir d'eux que le mouvement s'étendra. Si peu d'auditeurs se révèlent intéressés, s'ils manquent de persévérance, il ne faut aucunement se décourager ; les idées peuvent mûrir lentement dans les esprits et ne se réaliser que plus tard, soit spontanément, soit après une nouvelle action éducative — c'est, en effet, uniquement dans le découragement ou l'abandon du Chef de Centre que réside l'échec réel et complet d'une campagne.
Marcel LESNE
Inspecteur d’Académie, chargé du Service des Centres Sociaux Educatifs